Canicule, révélateur impitoyable des inégalités sociales

Publié le par Louis Lacaze

Canicule, révélateur impitoyable des inégalités sociales

Une maternité à Manille l’été c’est l’enfer. Image du journal The Guardian

Traverser une ville surchauffée pendant une période de forte canicule offre un contraste frappant : les trottoirs sont déserts, les parcs publics vides, des quartiers entiers semblent avoir été abandonnés. Passer dans des quartiers périphériques peut faire apparaître les pauvres, les sans-abris, les immigrés clandestins, ceux qui ne peuvent pas échapper à la vague de chaleur. La ville est divisée entre les nantis et les laissés pour compte.

Ceci n’est pas le tableau d’une ville du quart monde. Cinquante quatre habitants de Montréal ont été tués par la chaleur cet été. En majorité ils avaient plus de 50 ans, vivaient seuls, étaient de santé fragile ; aucun n’avait la climatisation. S’ils étaient installés près d’une grande voie de circulation, la pollution par l’ozone provenant des oxydes d’azote leur faisait courir un risque supplémentaire.

Le problème est global. En Inde, les habitants des bidonvilles sont les plus touchés. Au Caire, des immeubles modernes ont remplacé les maisons aux murs épais peintes en blanc qui faisaient de l’ombre aux rues. Dans une maternité de Manille où la chaleur est aggravée par une humidité étouffante,  les jeunes mères peuvent se retrouver à cinq pour un lit dans une salle non climatisée, très peu peuvent s’offrir pour dix dollars U.S. le luxe d’une chambre privée climatisée.

L’OMS annonce qu’en 2030 la population mondiale habitera en ville à 60%, ce qui ne pourra qu’aggraver la situation. Des solutions existent, souvent à un prix abordable. En 2015, la canicule avait tué trois mille personnes en Inde, deux cents en 2018. Les parcs publics ont été ouverts à tous, l’eau distribuée gratuitement ; le fait de peindre les toits des bidonvilles en blanc a permis une baisse de température de 5°.

Les spécialistes recommandent la création d’espaces verts qui peuvent abaisser la température de 11° à 25° et diminuent de 5%  le risque de mortalité en période de canicule[1]. Ils suggèrent l’emploi de couleurs claires pour réverbérer la chaleur au lieu de l’absorber. Subventionner fortement l’installation de climatiseurs pourrait gommer partiellement les inégalités socio-économiques mais la médaille a son revers avec une demande accrue d’électricité. Les villes devront donc rechercher en priorité des énergies renouvelables n’augmentant pas l’effet de serre.

Sources :


[1] Schinasi LH, Benmarhnia T, De Roos AJ. Modification of the association between high ambient temperature and health by urban microclimate indicators: A systematic review and meta-analysis. Environ Res. 2018 Feb;161:168-180.

 

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