Un médecin peut être tenté d'écrire pour un public de non-spécialistes

Publié le par Louis Lacaze

Un médecin peut être tenté d'écrire pour un public de non-spécialistes

Rosanne Leizig et Louis Aronson, gériatres, invitées de Geripal, exposent les raisons qui les ont poussées à écrire des ouvrages s'adressant à un public non-initié.

 Au cours de leurs consultations gériatriques, elles ont pu constater que leurs patients ne différenciaient pas les transformations qui accompagnent normalement le vieillissement de celles qui relèvent de la pathologie et peuvent être traitées. A partir de leur expérience professionnelle et des travaux de recherche en gériatrie, elles ont voulu mettre à la disposition de leurs lecteurs un instrument leur permettant d'avoir facilement accès à une information fiable.

Pour elles, les auteurs doivent avoir une vision claire du lectorat qu'ils désirent toucher ; pourquoi s'adresser directement à un lecteur profane ? Pour qu'il surveille sa santé plus efficacement ? Pour qu'il modifie son vote, participe à des manifestations ? Cibler le public convenablement facilitera cet exercice et augmentera les chances de voir le lecteur poursuivre sa lecture. Pour contrecarrer le mal contemporain qui pousse à zapper au premier signe d'ennui ou de difficulté de compréhension, l'auteur ne doit pas chercher à tout dire mais se limiter à quelques idées en convaincant le lecteur de leur importance ou exciter sa curiosité en lui faisant découvrir un domaine inconnu.

Bien qu'expert sur le sujet, l'auteur doit se garder d'être perçu comme tel ; il s'agit de créer une ambiance authentique d'amitié cordiale où lecteur et auteur avancent la main dans la main, partagent leur vulnérabilité, leur ignorance et leur désir de partager l'accès à la connaissance proposée.

Un texte s'adressant à des spécialistes de la discipline peut toucher quelques centaines de milliers de personnes (aux USA, NDLR). S'il est diffusé par la presse nationale et déclenche une dizaine de réactions sur internet, il sera lu par des millions, le rêve de tout écrivain. Pour que ce rêve devienne réalité, encore faut-il trouver un éditeur de bonne volonté ; or les mots vieillesse, seniors, très peu porteurs sur le plan commercial, ont tendance à déclencher une allergie, y compris dans la profession.

Commentaires de Bernard Pradines. Exemple américain qui se fonde davantage sur le nombre des personnes ciblées que sur les buts poursuivis en termes de mobilisation sociétale. Encore que les auteurs citent la modification du vote et la participation à des manifestations.  Il s’agit là d’un exercice particulièrement difficile dans lequel  GérontoLiberté s’est engagé depuis janvier 2013. Une œuvre qui se veut utile dans la mesure où les sujets traités intéressent la société toute entière. Ne sommes-nous pas tous, ou presque, candidats à vieillir ? Pas seulement les soignants parmi lesquels se trouvent les médecins. Or la spécialisation comporte un piège redoutable : celui de déposséder le citoyen de certaines prérogatives qui lui appartiennent. Le principal exemple quotidien est la fréquente invalidation de la parole des familles autrefois détentrices du savoir de l’accompagnement des personnes âgées vulnérables. Fini le domicile familial, vive l’établissement spécialisé. Nous en payons chaque jour le prix dans un océan d’incompréhensions, même s’il fait partie d’un univers souvent harmonieux. De plus, laisser les seuls spécialistes face à leurs défis, c’est surestimer leur pouvoir d’intervention. Combien de fois m’a-t-on demandé de faire embaucher davantage de personnels soignants ! Comme si ce genre de problème majeur, national et international, pouvait être réglé par un seul gériatre. Vous avez compris que je ne cesserai pas de témoigner de ce que j’ai cru comprendre de ce basculement de la société, de ce grand remplacement de la famille par des institutions à domicile et en établissement. Jusqu’à mon incapacité ou à ma mort !

Publié dans Expression, éthique, politique

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L
Il est toujours gratifiant pour les auteurs d’apprendre qu’une contribution a été appréciée. Avec une inquiétude toutefois : s’astreindre à résumer un texte de 95 lignes sans dépasser un cap de 25 ne peut que déclencher une certaine inquiétude. Le contenu du texte d’origine est-il respecté ? Que penser pour les résumés des entretiens de Geripal qui peuvent dépasser les 700 lignes ? On ne peut que souhaiter qu’une majorité de nos lecteurs n’hésitent pas à consulter les textes d’origine, pourquoi pas en s’accompagnant de la version sonore pour les anglicistes chevronnés ?
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G
excellent et combien vrai !!!
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B
Merci pour ces encouragements. Ne pas hésiter à proposer des textes. Bernard