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La vieillesse, ça n'existe pas...

Publié le par Didier Martz

La vieillesse, ça n'existe pas...
"…. je ne l'ai pas rencontrée. Contrairement à André Frossard, billettiste au Figaro, qui avait affirmé l'existence de Dieu parce qu'il l'avait rencontré à 17 h 10 un certain 8 juillet 1935 en l'église Saint-Sulpice à Paris, je n'ai pas rencontré la Vieillesse. Comme Dieu, elle est un mot, une abstraction. Sauf que Dieu ne se définit pas alors qu'on tente par tous les moyens de circonscrire la vieillesse, de l'enfermer dans des définitions. Et elles sont nombreuses : historique, sociologique, psychologique, psychanalytique, scientifique, gérontologique, gériatrique, philosophique... Sauf qu'au bout du compte la somme de ces contributions est nulle dans la mesure où elles ne saisissent à chaque fois qu'une parcelle des individus, jamais l'homme en son entier, dans son être réel ou sa personne. Comme dit Michel Foucault, toutes ces tentatives de définition dissolvent l'homme, l'éclatent en mille morceaux. Et plus nous connaissons moins nous connaissons. Ainsi, faut-il peut-être considérer que comme le mot « chien » de Spinoza n'aboie pas, le mot vieillesse ne vieillit pas ?"
 
Lire la suite... texte complet en fichier lié ci-dessous, après la présentation de l'auteur.
Qui est Didier Martz ?
 
Didier MARTZ, philosophe, essayiste, musicien - ex-professeur de philosophie à l'Université de Reims et Marne-la-Vallée – Intervenant DU Ethique Paris/REIMS/Marseille - conférencier, formateur, consultant, animateur de cafés et de goûters de philosophie et débats, chroniqueur radios, auteur d'ouvrages sur la vieillesse, le handicap, l'exclusion et autres - Membre du Think Tank « Droit de Cité » à Reims.

Ex-directeur de cabinet près le recteur de l'Académie de Reims, ex-chargé de mission sur l'enseignement supérieur et la recherche près le recteur et le préfet de région.

Membre de l'association JALMALV, du GEPAJH, de « EHPAD' de côté » et de comités d'éthique – Président de l'association « Le temps qu'il fait... dans les consciences ».

Publications

Vieillir comme le bon vin – Pour une vieillesse effervescente (co-dirigé avec Michel Billé - à paraître septembre 2021)

Ainsi va le monde – Chroniques philosophiques de la vie ordinaire – 2008/2018 – chez l'auteur - 2019

Liberté : approche plurielle - Mélanges - Université de Marrakech - Janvier 18
Vieillesse un autre regard - (Collectif) - ERES - Mars 2018
La tyrannie du Bienvieillir (avec Michel Billé) - Réédition augmentée (mars 2018) - ERES
La lumière noire du suicide (avec Hélène Genet) - ERES
Dépendance quand tu nous tiens (avec M. Billé et MF Bonicel) - ERES
Dictionnaire impertinent de la vieillesse (Collectif)-ERES (sept.17)
Vivre quand le corps fout le camp - (Collectif) - ERES
Vous avez dit euthanasie ? Le bord de l'eau (épuisé)
Alzheimer : vous avez dit démence ? Le bord de l'eau (épuisé)

Derniers articles

Le secret - Les cahiers dynamiques 2019 ERES

Protection de l'enfance : la diversification dans tous ses états 2019 ERES

Comment une ville tient debout - Hors-Série : Forum Urba – Les cahiers de l’agence (AUDRR)

Couverture et quatrième page de l'ouvrage : "Ainsi va le monde" :

Blog 

La vieillesse, ça n'existe pas...
…. je ne l'ai pas rencontrée. Contrairement à André Frossard, billettiste au Figaro, qui avait affirmé l'existence de Dieu parce qu'il l'avait rencontré à 17 h 10 un certain 8 juillet 1935 en l'église Saint-Sulpice à Paris, je n'ai pas rencontré la vieillesse. Comme Dieu, elle est un mot, une abstraction. Sauf que Dieu ne se définit pas alors qu'on tente par tous les moyens de circonscrire la vieillesse, de l'enfermer dans des définitions. Et elles sont nombreuses : historique, sociologique, psychologique, psychanalytique, scientifique, gérontologique, gériatrique, philosophique... Sauf qu'au bout du compte la somme de ces contributions est nulle dans la mesure où elles ne saisissent qu'une parcelle des individus, jamais l'homme en son entier, dans son être réel ou sa personne.
Comme dit Michel Foucault, toutes ces tentatives de définition dissolvent l'homme, l'éclatent en mille morceaux. Définir c'est fixer, délimiter et par conséquent écarter, exclure ce qui ne rentre pas dans le cadre.


Monsieur Martin
Voilà bien une personne âgée autrement dit qui a vécu longtemps. On ajoutera qu'il a des rides, des cheveux blancs, qu'il est un peu voûté et que sa marche est ralentie. Au besoin on ajoutera quelques-unes de ses maladies ou pathologies qui font qu'une partie de sa vie se passe de médecins en opération et pharmacies. Mais avec tous ces éléments, nous n'avons pas « épuisé le sujet ».
Certes, en perdant en extension, les vieux en général, nous avons gagné en compréhension, autrement dit nous voyons mieux de quoi il est question dans la singularité de monsieur Martin, mais nous sentons bien qu'il manque encore quelque chose. Alors, un peu de biologie et consultons les rythmes cardiaques et autres analyses de sang qui fixent les fourchettes à l'intérieur desquelles on est dans la normalité ; ou bien tournons-nous vers l'OMS qui fixent les seuils : un peu vieux de 65 à 75 années, puis vieux de 75 à 85, enfin très vieux à partir de 85 et plus loin la « fin de vie » ; sans oublier la sociologie qui semble dire que vieillir seule aux Mureaux dans la résidence Bellevue, tour des Capucines au cinquième étage avec ascenseur capricieux et maigre retraite n'est pas comparable avec vieillir à Neuilly sur Seine dans le seizième arrondissement gouverné par des gouvernantes et soutenu par des dividendes consistants. La vieille Groseille n'est pas la vieille Duquesnoy. Pour compliquer encore l'analyse, Pierre Bourdieu ajoutera au « capital » économique les « capitaux » social, culturel et symbolique inégalement partagés. Au risque d'agacer et d'irriter avec ce long développement, on notera que la société, ses représentations et ses opinions se confondent en appellations de toutes sortes : quadra, quinqua, jeunes vieux, vieux jeunes, retraités, aînés, seniors, papy et mammy, âgé, vieillard, en fin de vie, centenaires, etc. Toute une « forêt de symboles » (Baudelaire) pour nous opposer aux rigueurs du monde et aux angoisses de la maladie et de la mort. Toute cette gymnastique langagière pour surtout ne pas nommer. La vieillesse n'est rien qu'un mot. Et comme le mot « chien » de Spinoza n'aboie pas, le mot vieux ne parle pas. Ou alors, peut-être, seulement du « bout des yeux » (Brel).


Dramatiser le réel
Bref, en gagnant en compréhension, en touchant à la singularité des êtres, les notions de vieillesse, de vieux et de vieilles explosent et ne servent qu'à parler en général dans des salons, des livres et des conférences. Ce qui est bien confortable, car ainsi, on n'est pas dérangé par la réalité, souvent dure et cruelle. Pour reprendre improprement une expression de Gilles Deleuze, nous devons – ne serait-ce que pour inquiéter de temps en temps nos mots pompeux - « dramatiser » nos discours généraux et reprendre les questions du Quintilien romain remises au goût du jour dans les stages de management : Qui ? Quand ? Où ? Quoi ? Comment ? Pour quoi/pourquoi ? De quels vieux parlez-vous ? De quelles époques ? Dans quels lieux, quelles sociétés ? De quelles conditions de vie ? Le quoi et le pourquoi portant à nous interroger sur les raisons de notre intérêt à traiter des questions de vieillesse. Il est probable qu'outre l'intérêt pour la recherche et l'étude ou celui d'être dans un opportuniste air du temps, s'invite une angoisse contemporaine par rapport à la mort et la maladie. La question du sens de la vie pourrait y être pour quelque chose. Peut-être espérons-nous, en auscultant les « vieux » et les « vieilles » trouver quelque réponse, et en les accommodant à les rendre plus à même de nous renseigner sur notre propre devenir.
Le traitement de la vieillesse de manière circonstanciée, par les circonstances, les conditions, rend à nouveau caducs tous les propos généraux sur ce qu'on pensait être une réalité. Eh bien non la vieillesse n'existe pas, pas plus que les vieux et les vieilles. Nous voilà bien démunis s'il faut maintenant les supprimer de notre vocabulaire. Privé de grands et gros mots nous voilà bien dépourvus lorsque la bise froide du réel vient cogner à nos huis. Devant la multiplicité des points de vue, le risque alors est d'être conduit au relativisme presque absolu, traduit par la fameuse expression : ça dépend ! En effet si ça dépend de chacun, du midi qu'il perçoit à sa porte après avoir balayé devant, tout s'annule, tout s'équivaut, « circulez, il n'y a plus rien à penser ». « Ça dépend », un joker souvent utilisé pour empêcher la réflexion de se poursuivre.


La vieillesse, un phénomène naturel ?
Les données naturelles semblent alors rester le seul appui pour une définition de la vieillesse. Dans la nature, tous les éléments naissent, meurent et dégénèrent. Tous les corps se dégradent y compris le corps humain. Les signes sont visibles. Signes physiques, physiologiques, psychiques, signes de dégénérescence. Mais la nature n’indique pas clairement quand on est vieux et les données naturelles, contrairement à ce qu’on pourrait croire d’abord, pourraient bien être tout aussi relatives que les critères socioculturels ; le phénomène de
l’entropie1 ne peut pas être appliqué strictement à l’homme, celui-ci peut entraver, par sa dimension morale, mais aussi par la médecine,
par la volonté, le pur processus de perdition énergétique. C’est le cas pour les rides, considérées comme un indicateur de la vieillesse, comme un désordre introduit dans l’ordre lisse du visage auquel il faut absolument remédier et tenter de réparer « les outrages du temps » ! Ainsi, si les données naturelles indiquent bien un processus de vieillissement, c’est le rapport culturel que nous entretenons avec lui qui nous dit être vieux ou non, voire qui rend pensable la vieillesse. Et qui par une illusion rétrospective laisse entendre que la « vieillesse » a toujours existé. Les données de nature, toujours recouvertes par une dimension culturelle, ne donneraient rien de plus que ce que les individus veulent bien en dire. Pourtant, elles laissent entendre que la vieillesse, donnée de nature, serait un phénomène existant de tout temps, escamotant l’idée qu’elle est une construction sociale et, par conséquent, dédouanant l’action politique de toute responsabilité la concernant.


La vieillesse, une idée reçue
En somme, la vieillesse est une notion relative et par conséquent une idée reçue. Rien ne semble pouvoir indiquer qu’elle est une valeur absolue. Il n’y a que des critères relatifs (culturels, historiques, personnels, sociaux) qui l’indiquent. Ces critères peuvent changer, ils sont contingents et conditionnés, voire conventionnels. On est toujours vieux par rapport à quelqu’un d’autre, mais aussi plus jeune qu’un autre. Seul celui qui est le « plus » vieux pourrait être dit tel (le doyen de l’humanité), mais n’est-ce pas là un symbole ou une fiction ? Sinon comment faire la différence entre un jeune vieux et un vieux jeune ? Comment expliquer la fluctuation de l’appréhension personnelle de « sa » vieillesse qui dépend des circonstances, des humeurs, du regard des autres, de ses propres représentations ? On peut être vieux dans son corps et rester jeune dans sa tête. Ou inversement : le temps ne faisant en quelque sorte « rien à l’affaire » ! Dans l’existence, on est toujours plus vieux qu’on n’était, mais on est aussi toujours plus jeune qu’on ne sera. Dans ce cas on est toujours vieux ou bien jamais. Avec Simone de Beauvoir, on n'est pas vieux, on le devient !


On n'est pas vieux, on se sent vieux
Et pourtant, on est vieux. Où plutôt qu'être on se sent vieux. Et se sentir ceci ou cela ne tombe pas du ciel, mais d'une société qui fournit des images et des représentations. Elle fixe des normes, dit ce qu'on est ou qu'on n'est pas, ce qui est bien ou pas, ce qui est normal ou pas. Elle, par contre, procède par discours et notions généraux. Elle a besoin des vieux, des jeunes, des handicapés, des gros, des maigres... en général. Elle cible, étiquette, catégorise. On aime bien les mots « vieillesse, vieux, vieille... », on aime bien les cases et les tiroirs où ranger nos angoisses, l'horreur du désordre et du chaos et on n'y renoncera pas facilement. Nous préférons la stabilité des notions... au détriment de la vie réelle, toujours trop variée
et diverse, toujours réticente à se laisser enfermer.
Ceci étant, je suis maintenant bien embarrassé, car devant continuer à parler en général et à employer le mot « vieillesse » au risque de me contredire. Mais avec cet avantage qu'il est à maintenant à utiliser avec prudence et se méfier de toute généralisation abusive. Il y a un précédent : René Descartes, le philosophe, en voulant faire table rase de toutes les évidences et connaissances héritées du passé, n'en gardait pas moins une « morale provisoire » ! Donc désormais, « vieillesse », mais avec des guillemets. Comme dit Claudel, on rit entre les guillemets !


Le marché de la « vieillesse »
On ajoutera un autre « mais ». Maintenir des catégories, en créer, c'est avoir des cibles comme on dit en marketing. C'est pouvoir introduire sur un marché des produits destinés à des individus constitués à cette occasion en clients. Les marges de manœuvre se réduisant, elles obligent l'entrepreneur à être entreprenant, à aller toujours plus loin dans sa recherche de profit sinon il meurt. Production d'objets inutiles, exploitation massive des forêts, exploitation de « niches », etc. Et surtout création de faux besoins notamment en isolant certaines catégories de personnes ou plutôt en créant des catégories de personnes qui se trouvent, par miracle, avoir des besoins spécifiques dont la satisfaction se trouvera justement sur le marché. Pour les gens devenus vieux, aînés ou autres, c'est la Silver Économie et son idéologie d'accompagnement, le Bienvieillir2.
Et justement il se trouve que vieillir bien ou du mieux possible est une aspiration largement partagée. Ainsi a-t-on vu apparaître, opportunément, une catégorie dite de « séniors » qui sur la publicité portent – car se sont des hommes – leur compagne sur leurs épaules en général au bord de la mer et en pull de laine authentique de fabrication artisanale ou bien se rassemblent en famille autour d'un barbecue sur pelouse verte et fond de résidence. Les séniors dotés d'un « capital » qu'il faut entretenir à coups de ceci et de cela : cosmétiques, diététiques, physiques, médicaux... Et un capital, ça se gère e
t se « coache ».
Et derrière, autre arrière-plan, une autre « vieillesse » isolée au fond d'un EHPAD ou dans la tour B de l'immeuble C. Cette « vieillesse » d'un Montaigne, « engagé dans ses avenues », qui fait de lui un demi-être qui n'est plus... lui. Elle a moins d'intérêt encore qu'il est probable que « la fin de vie » devienne elle aussi un nouveau marché.


L'homme quantifié
Cette logique commerciale repose en effet sur un mode de pensée qui gagne et a gagné progressivement les esprits, pensée qu'on appelle instrumentale ou pensée « quantificatrice », « algorithmée ». C'est-à-dire la mise en chiffres des activités humaines, des comportements humains et de l'être humain dont l'expression dominante est l'évaluation. Pour ce faire, on découpe l'homme sinon en morceaux du moins en critères et indicateurs qu'on enferme dans des grilles. Dans tous les domaines, on y a recours (éducation, entreprise, médecine...) au point que l'homme dans sa globalité disparaît et se dissout. La raison instrumentale et analytique, celle qui perd de vue les finalités, viendra sans doute à bout prochainement des émotions et des sentiments. Sans finalité donc sans valeurs, nul besoin d'éthique dans la quantification mathématique et statistique.
La grille « patient-traceur » (oui, c'est bien ainsi qu'on l'appelle) pour les handicapés ou la grille AGGIR touchent au summum en matière de langue technocratique et de procédé quantificateur et algorithmé. Si l'on veut appréhender concrètement ce qu'est l'éclatement d'un individu en mille morceaux, la grille AGGIR en témoigne. D'abord, rappeler ce que signifie le sigle. Les sigles sont bien commodes pour cacher la réalité du réel. AGGIR signifie Autonomie Gérontologie Groupe Iso Ressources. Ne manque que la norme AFNOR ! Elle permet de mesurer le degré de perte d'autonomie du demandeur de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Les degrés de perte d'autonomie sont classés en 6 groupes iso-ressources (sic). À chaque GIR correspond un niveau de besoins d'aides pour accomplir les actes essentiels de la vie quotidienne.
Outre l'approche critériée, cette grille est idéologique dans sa conception de l'être humain. C'est une idéolo-gire. Elle trace sans vergogne au vu eu su de tous et de lui-même ce qu'est son devenir décompté de 6 à 1. « D'autonome pour les actes essentiels de la vie courante » (degré 1) à « confiné au lit ou au fauteuil, dont les fonctions mentales sont gravement altérées et qui nécessite une présence indispensable et continue d'intervenants » (degré 6) en passant par « personne ayant conservé son autonomie mentale, partiellement son autonomie locomotrice, mais qui a besoin quotidiennement et plusieurs fois par jour d'une aide pour les soins corporels » (degré 3).
Réjouissance garantie pour le futur !
Par ailleurs et toujours idéologiquement, elle ne prend pas en compte des qualités ou défauts qui font qu'un être humain est un être humain. Pour ne garder que les qualités, nul n'est fait mention de la générosité de Monsieur Martin ou de ses actes de résistance pendant la guerre. Elle omet la sexuali
té de Monsieur Martin et ne juge pas digne d'une allocation le fait d'avoir des rapports sexuels réguliers. Enfin ou presque, elle estime que faire état de revendications, participer à la vie de l'établissement ou de la société n'entre pas non plus dans la grille.


Auto-nomie et auto-mobile
Enfin, et cette fois vraiment, un paragraphe spécifique pour dénoncer une confusion qui n'est pas sans conséquence concrète dans la façon dont on se représente un individu vieillissant – et peut-être même en général -. Cette fameuse grille mesure « les capacités de la personne âgée à accomplir : 10 activités corporelles et mentales, dites activités discriminantes et 7 activités domestiques et sociales, dites activités illustratives. » Par exemple, « personne encore autonome pour les actes essentiels de la vie courante » (6) ; « personne n'assumant pas seule ses transferts, mais qui, une fois levée, peut se déplacer à l'intérieur de son logement, et qui a besoin d'aides pour la toilette et l'habillage » (4) ; « personne ayant conservé son autonomie mentale, partiellement son autonomie locomotrice, mais qui a besoin quotidiennement et plusieurs fois par jour d'une aide
pour les soins corporels (3) ». Le tout coiffé sous l'appellation « perte d'autonomie » ou dépendance. On confond ici auto-nomie avec auto-mobile ; libre arbitre, choix, volonté... avec se déplacer, faire, opérer.... Mo
nsieur Martin grabataire fait part de ses désirs et envies. Il estime que le fonctionnement de l'établissement n'est pas satisfaisant ; il réclame d'être « changé » plus souvent, d'être réveillé plus tard, etc. Monsieur Martin fait alors preuve d'autonomie (pour être plus tranquille, on dira qu'il est capricieux). L'autonomie est cette capacité à obéir à des règles qu'on s'est prescrites ou des règles auxquelles on a contribué à l'élaboration. Monsieur Roland qui court sur ses deux jambes le long des berges mornes d'un canal est certes auto-mobile mais peut-être pas autonome dans sa vie active ou inactive.
Nous sommes toujours, vieux ou jeunes, dans la dépendance de quelqu'un ne serait-ce que pour être aidé dans l'accomplissement de quelque besogne quotidienne, dans la réalisation d'une tâche. Et nous perdons notre autonomie, vieux ou jeunes, dès lors que nous sommes dans la soumission et la subordination, dès lors que nous perdons tout esprit critique. En ce sens, il pourrait alors être intéressant de construire une grille évaluant le degré d'autonomie de Monsieur Martin de 6 à 1. À l'inverse, confondre auto-nomie et auto-mobile c'est soumettre monsieur Martin surtout lorsque pouvoir intervenir dans sa vie pratique autorise à ne pas lui demander son avis. Pour une personne autonome, il n'y a pas de vieillesse, car elle n'a l'âge que de sa vitalité, mais difficile à imposer dans des processus de neutralisation de la personne.


Vieux, vieilles : une certaine manière d'être
Laissons cela. Je prendrai maintenant la « vieillesse » par un autre bout ou plutôt deux. Pour le premier, il faut quitter une forme de pensée occidentale qui a tendance à vouloir fixer les choses, à les stabiliser dans des catégories. Je l'ai mentionné rapidement ci-dessus. Il lui faut des cases pour ranger les choses et les êtres. Ce n'est pas le cas d'une certaine pensée chinoise qui elle pense en flux, en dynamique, en instabilité. Pas de vieillesse ou autres vieux et vieilles, mais que des manières d'être selon les âges de la vie et selon les circonstances, les situations. On n'est pas vieux une fois pour toutes, catalogués comme tels, mais en situation, on se sentira ou non vieux ou jeune, ou ceci ou cela selon les mots qu'on aimera employer. On peut aussi se sentir ni vieux ni jeunes, mais beaux ou laids, courageux ou lâches, révoltés ou indifférents, autonomes ou contraints... Le philosophe Spinoza parlerait de modes d'être. Ce qui fait que certains auraient des manières d'être « jeunes » même en étant « vieux » ou l'inverse. Exit la vieillesse, on se sent ceci ou cela pr
esque un genre qu'on se donne. Oui, c'est bien cela, un genre qu'on se donne ! Ni vieux ni jeune, Monsieur Martin se sent bien ou mal, beau ou laid, fier ou pas... Se sentir tel ou tel permet de briser les catégories fixes et établies. Pour garder le sujet intact, encore un peu libre parmi tout ce qui le détermine et le contraint. Certes, « mon visage a quelques traits un peu vieux », mais je me sens bien et « je vous emmerde en attendant !» (Corneille et Brassens paraphrasés)


L'homme (nom générique) révolté
J'en viens à mon deuxième point lui aussi inspiré d'un mode de pensée occidentale, mais avec des conséquences autrement fâcheuses. Mes réflexions sur la « vieillesse », le « handicap » et plus généralement les éclopés de la vie ou les « désaffectés » de la vie partent d'un constat. Elles reposent sans doute et aussi sur mon rapport avec ma finitude et ma fragilité, mais elles s'appuient sur l'écart observé entre des discours et une certaine réalité. Écart qui provoque de l'agacement voire de la révolte, expérience subjective de haute intensité qui provoque réflexion et action. Donc d'une part, des discours. En vrac, sur les droits de l'homme, de leur dignité, sur la morale, l'éthique, le respect, l'autonomie, l'égalité, la liberté, etc. les bouches et les plumes en sont pleines. D'autre part, des situations. En vrac, des pauvres, des SDF, des migrants dans des camps ou des centres, des exclus, des isolés... bref des conditions de vie dé-solées (Hanna Arendt). Dans cet écart des discours et des politiques et la réalité des gens, il y a de quoi y mettre de la révolte.
Dans les conditions qui leur sont faites, ici, « le temps ne fait rien à l'affaire », jeune ou vieille, « tous peuvent en être atteints ». De ce constat, deux réflexions principales : l'une théorique ou philosophique, l'autre pratique. Non, c'est mal dit. L'une dans le champ philosophique, l'autre dans le champ de la morale ou éthique. Quoique les deux soient liées.


Que reste-t-il lorsqu'on a tout perdu ou presque ?
Dans le premier et au vu de ce constat, une question. Elle m'est inspirée du philosophe Blaise Pascal qui se demande ce qu'est le Moi et ce qu'il en reste lorsqu'il a perdu les qualités qui le constituaient comme tel. Quant à moi, je pose la question de la manière suivante : que reste-t-il de la personne lorsqu'elle a perdu tout ou partie des qual
ités qui faisaient d'elles une personne ? Par qualités, j'entends pour l'essentiel qualité physique et mentale et qualité sociale. Le degré de qualité étant fixé par la société et globalement par la pensée occidentale et la philosophie à travers de normes comme l'intégrité physique et mentale et un certain statut social moyen. Par exemple, la philosophie aime bien l'individu libre, volontaire, capable de faire des choix, etc. Plus largement la société et ses représentations préfèrent les gens moyens, ordinaires ayant toute leur tête, pas trop vieux, pas trop handicapés, pas trop noirs, pas trop homosexuels, pas trop gros et surtout pas migrants. Et s'ils sont jeunes, pas trop des quartiers sensibles par rapport aux quartiers insensibles.
La société embauche, loge, éduque, soigne plus facilement les gens ordinaires, les « pas trop » ceci ou cela. Comme Aristote, un autre philosophe, elle aime la mesure, le juste milieu, le « médiocre ».


Le vieux et le lavabo
Je passe sur les autres raisons, mais il y en a une qui me semble être fondamentale et qui organise nos représentations de ce qu'est un être « normal ». C'est la définition par la pensée philosophique ou métaphysique en termes d'essence et d'attributs. Trivialement, prenons un lavabo.
Son essence de lavabo tient à trois attributs principaux : une alimentation, une évacuation et qu'il soit concave. Les autres attributs, couleur, forme... sont secondaires. Il suffit qu'il lui manque un de ces attributs principaux et ce n'est plus un lavabo, il perd son essence de lavabo.
On jugera le parallèle osé, mais si l'essence d'un être humain tient à des attributs principaux comme l'intégrité physique et mentale ou dans les sociétés dites avancées à d'autres critères normatifs (genre, couleur, sta
tut social...), alors il suffit qu'il lui en manque un ou plusieurs pour que son essence d'homme soit relativisée ou plus radicalement lui soit retirée. L'histoire est pleine de ces « retraits ». Ainsi dans la manière de définir l'homme par des attributs, des qualités est contenue son exclusion possible. Nous n'en avons jamais fini avec cette essence de l'homme et fondamentalement, nous percevons celui ou celle qui n'est pas pareil à la norme naturelle ou culturelle. Hélas, suivi dans sa forme la plus simple de mise à l'écart ou plus gravement d'exclusion ou autres maltraitances.
D'où ma question : que reste-t-il de la personne lorsqu'elle n'a pas ou n'a pu, en tout ou partie, les qualités qui faisaient d'elle une personne ? Faute de réponse – théorique – dans ce cadre de pensée, nous répondons par une assertion morale et tautologique : une personne est une personne.


Une personne est une personne
Affirmation de principe qui n'a d'autre fondement qu'éthique ou moral. Affirmation nécessaire, mais qui est loin d'être suffisante pour garantir les personnes altérées de maltraitances, d'exactions voire d'éliminations. Hélas, l'histoire est pleine de ces brimades, oppressions et autres persécutions avec une particularité pour les sociétés modernes ou développées c'est qu'elles se déroulent sur fond de culture, de morale, d'éthique, etc.
L'Allemagne nazie pour prendre un exemple extrême est une nation hautement civilisée. Elle a des intellectuels de grande envergure, elle a ses philosophes, ses penseurs, ses religions... Et pourtant, ils et elles n'empêcheront rien. De la même manière, pour prendre un exemple plus ordinaire, la maltraitance sous toutes ses formes se pratique allégrement au pays des droits de l'homme, de la morale et de l'éthique. La liste des cas est longue. Donc l'affirmation de principe éthique et/ou morale est – faute d'autres choses - nécessaire, mais loin d'être suffisante. Mieux encore ou pire encore, elles pourraient servir la maltraitance.
L'hypothèse est osée, voire scandaleuse. Pourtant, Paul Valéry, à l'issue de la Première Guerre mondiale (qui n'avait rien de mondial), déclarait que désormais les civilisations se savaient mortelles. Point qu'on oublie, il ajoutait un peu plus loin combien il avait fallu de science et de morale pour en arriver là ! Déclaration qui invite à s'interroger sur le rôle que l'on peut faire jouer à l'éthique. Je n'ajoute plus moral, car il semble de plus en plus évident que l'éthique aujourd'hui est devenue l'autre appellation de la morale. Je passe.


Vous avez dit éthique ?
Sur le rôle que peut jouer l'éthique, les évènements récents montrent combien son discours est fragile. Notamment dans les situations provoquées dans les hôpitaux où l'on va être amenés à devoir choisir qui sera réanimé ou pas. Le jeune ? Le vieux ? La resp
onsabilité n'en incombe pas aux soignants et soignantes qui n'ont pas choisi les composantes de l'alternative, néanmoins contraints au choix. On peut imaginer, en effet, une situation où les conditions seraient réunies pour ne pas avoir à faire ce type de choix. Par exemple, personnels, moyens matériels, lits de réanimation en nombre suffisant pour accueillir tout le monde. Ce qui oblige en terme politique à choisir entre un rond-point pour les voitures et des lits pour un hôpital ou même à trouver les moyens ailleurs, dans quelque arrière-cour.
De plus, c'est que du jour au lendemain, les propos éthiques dominants sur les droits, le respect, la liberté, la dignité vont être balayés. Ainsi, sur RMC un manager sans ménagement assure que : « 50.000 morts en France, c’est pas énorme. Et quand on sait que c’est des gens âgés… 8.000 morts dans les Ehpad, c’est des gens qui allaient mourir de toute façon ».
Martin Hirsch, directeur de l'AP-HP précise sur une radio du servic
e public que : « Lorsque les réanimateurs jugeront que la réanimation n’a pour effet de prolonger que de huit jours, ils feront le rationnel (je souligne) de ne pas se lancer dans une réanimation dont la conclusion est déjà connue ». Faire le rationnel : doux euphémisme.
On ne résistera pas au plaisir de le citer encore, lui qui, il y a quelques années, déclarait à la manière de la chanson Lily de Pierre Perret où deux noires valent une blanche qu'à une voix de vieux réponde deux voix pour un jeune. Un suffrage censitaire en quelque sorte.
Le philosophe Comte-Sponville estime lui qu'une vie de jeune vaut plus qu'un bout de vie de vieux.
Arguments à l'appui.
Jean-François Delfraissy, professeur de médecine et président du conseil scientifique lance un appel : peut-on continuer à préserver la santé des anciens au détriment de la santé des plus jeunes ?
François de Closets, 87 ans, s'interroge : la vie n'a peut-être pas le même prix pour tous ? Et certaines valant plus que d'autres. Au grand dam de Malraux pour qui rien ne valait une vie, même si une vie ne vaut rien.
Vous avez dit vieillesse ? Vieux ? Vieilles ? Des notions difficiles à établir, mais qui plus est ne tiennent plus devant, comme on dit, le poids des réalités. Si l'éthique ne peut contraindre le réel, c'est elle qui s'y pliera. On sait combien elle court après ce qu'on appelle les avancées technologiques ou les revendications des groupes sociaux. On peut même envisager ce à quoi elle devra souscrire. Il y a trente ans, Jacques Attali développe dans une interview, une analyse prémonitoire montrant que face à une espérance de vie grandissante la question de l'euthanasie se poserait. Et le journaliste d'ajouter qu'il lui faudrait alors une éthique. Une éthique de l'euthanasie.
En effet, le propos n'est pas nouveau. Jérôme Pélissier, dans un article du livre « L'avancée en âge, un art de vivre » montre qu'un spectre hante l'Europe et la France : le vieillissement de la population. Bien avant celui des migrations, le grand remplacement commence, des jeunes par les vieux. Menace démographique, menace politique, menace économique, bref la « marée grise » menace de recouvrir le pays. Et alors ? Il n'y a rien à dire, les conclusions à en tirer s'énoncent d'elles-mêmes.
Contrairement à ce qu'avance Michel Billé, sociologue, la vieillesse est loin d'être
considérée comme une chance. Elle est un problème. Et il faut une bonne dose de « moraline » convertie aujourd'hui en éthique pour nous empêcher d'aller trop loin. On ne se débarrasse pas des vieux et de la « vieillesse » aussi facilement. Il suffit de les délaisser.


Vieux dé-solés
D'abord en les isolant. Dans leur domicile ou bien en les concentrant ensemble dans un
même lieu, sorte de centre de rétention, de non-lieu (Marc Augé). Lieu de transit vers la mort. Lieu de neutralisation des individus, de leurs droits, de leurs désirs toujours trop capricieux, lieu de neutralisation des sujets. Désert social (Baudrillard) qui s'accroît où l'on peut être seul ensemble, alone together chante le standard de jazz, ou bien seul, isolé et dé-solé. La dé-solation selon Hannah Arendt c'est pour l'individu séparé des autres et dans l'impossibilité de se retrouver, la perte du moi.
L'homme dé-solé n'a plus de sol sur lequel s'appuyer. Selon Hannah Arendt, la désolation était jusqu'à il y a encore quelque temps une expérience limite subie dans certaines conditions sociales marginales, telles que la vieillesse. Elle devient maintenant l’expérience quotidienne de masses toujours croissantes. Le processus d'individuation – et non pas l'individualisme qui fait tout reposer sur la tête d'individus supposés égoïstes – en est le principal moteur. Vieux, handicapés, migrants, SDF, pauvres sont des témoins de la désolation, de la mise hors sol social.


Vieux aimés
Fort heureusement, on peut faire l'hypothèse qu'il existe en tout individu une sensibilité à la fragilité, à la souffrance d'autrui. Les uns opteront pour un penchant naturel comme chez Rousseau ou Orwell. Ce dernier parlera d'une common decency, d'une décence commune à tout individu qui le pousse à la compassion, à souffrir avec l'autre. L'engagement des soignants et soignantes dans la crise sanitaire n'est sûrement pas que professionnel ; les autres opteront pour un penchant culturel construit au fil des siècles par l'idéologie chrétienne d'abord puis par l'humanisme des droits de l'homme ensuite, une seconde nature dirait Blaise Pascal. L'un ou l'autre qu'importe ! Et même si cette sensibilité commune, cette pulsion qui pousse vers la vie côtoie celle qui pousse vers la mort caractéristique des sociétés actuelles désemparées. Néanmoins, force passionnante et passionnée qui joue contre les forces mortifères et ennuyeuses.
Les êtres humains sont tous fragiles, ils sont juste rendus vulnérables par les conditions
qu'on leur fait. Ainsi des vieux et des vieilles. Fragiles évidemment. D'autant plus que par
dispositions contraignantes ou par l'absence de dispositions ils sont rendus vulnérables.

Comme le petit esclave à l'arrière du char du triomphateur romain lui souffle au milieu de sa gloire "memento mori, souviens-toi que tu es mortel ", les vieux et les vieilles par leur présence nous rappellent notre finitude. Une raison de plus pour les écarter. Mais une raison aussi pour apprendre à vivre.


L'enjeu philosophique : vieillir bien.
On aura sans doute senti, au fil de la lecture, qu'on ne se débarrasse pas aussi facilement de la « vieillesse », que je ne me suis pas débarrassé de la « vieillesse ». Et chacun de pointer la contradiction voire de s'en réjouir. La philosophie ne dit pas la vérité même si parfois et souvent elle ne doute de rien. On les connaît ceux qui se réclamant de Socrate font semblant de ne rien savoir et qui bardent leurs discours de certitudes. Nous ne savons pas penser dans la contradiction.
Trop vite nous voulons résoudre les deux termes à un seul terme parce que c'est plus confortable alors qu'il suffirait d'apprendre à les faire vivre ensemble. Souvent ils s'accommodent l'un l'autre.
Un des principes de la philosophie chinoise repris par Edgar Morin dans une forme de pensée dite « complexe » est celui de contradiction. Contre la pensée classique qui veut qu'on ne peut avoir « en même temps » A et non-A, il dit au contraire qu'il est possible de les faire tenir ensemble. Pas facile de tenir ensemble que la vieillesse n'existe pas et pourtant qu'elle existe ! Et pourtant...
A ce stade de la réflexion et parce qu'après tout je vieillis, vieillir c'est apprendre à perdre,
on ne gagne pas à tous les coups et à ce jeu-là il n'y a pas de norme qui vaille. L'idéalisation de l'autonomie a des effets pervers. Elle conduit souvent à dévaloriser la dépendance ou à se protéger de la lente érosion du temps qui passe, voire de la mort. Vieillir, c'est apprendre à avancer en compagnie d'un moi nouveau et d'un corps inconnu, car la vieillesse est une autre allure de la vie.
De surcroît sans garantie. Facile à dire moins à vivre.
Vers une abolition de la vieillesse ? La liquider. Vouloir des vieux qui vieillissent bien c'est
sacrifier ceux qui vieillissent mal. Dire à chacun qu'il devrait être possible d'aller jusqu'au terme de son voyage sans coup férir, de jouir jusqu'au bout de sa vie est réconfortant, mais mensonger.
Comme si chacun avait la maîtrise de son capital vie, qu'il pouvait le gérer, avoir sa qualité de vie à disposition, son espérance de vie à disposition. Si c'est cela le projet de vie qu'on nous propose alors on fait barrage à une vraie pensée de la vieillesse.
L'approche philosophique comme salut ou comme apprentissage du vivre vieux : apprendre à mourir, ne plus avoir peur (Epicure) ; la question de la vie, cesser de perdre sa vie (Sénèque). Une question mal posée : ce n'est pas comment vivre le plus longtemps possible jeune ? Mais comment vivre vieux ? Donc, apprendre à vivre. A sa manière.

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1 L’encyclopédie en ligne de l’agora. « On appelle entropie le processus par lequel l’énergie disponible se transforme en énergie non disponible. […] il s’agit là d’une loi de la nature qui constitue une réponse à la question Où va le monde ? Il va à l’équilibre, à ce qui pour la matière est l’équivalent de la mort. Et ce processus est irréversible. […] l’énergie que la vie a rassemblée pour l’abandonner à la postérité sous forme de charbon, de pétrole ou de gaz, ne se reconstituera pas d’elle-même après avoir chauffé nos maisons et assuré le déplacement de nos véhicules. […] Une maison abandonnée à elle-même passe vite de l’ordre au désordre. Il faut ensuite une intervention extérieure accompagnée d’une grande dépense d’énergie pour remettre les choses en place et ainsi ramener l’ordre. »

2 Michel Billé, Didier Martz, La tyrannie du Bienvieillir, nouvelle édition, aux Editions ÈRES

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