Directives anticipées : la grande bouderie.
L’Institut National des Etudes Démographiques (INED) et l’Observatoire National de la Fin de Vie (ONFV) estiment à la fin de 2012 que « seuls 2,5% des patients concernés avaient rédigé des directives anticipées, comme l’autorise la Loi Leonetti. ». Et d’en déduire que « cela pose très clairement la question de l’appropriation des directives anticipées, à la fois par les patients et par les professionnels de santé. »
Pourquoi cette désaffection quant à la possibilité d’exprimer ses choix en vue de cette phase de la vie qui survient de plus en plus souvent au grand âge ? Qui plus est de manière plus progressive qu’autrefois ? Pourquoi nos contemporains n’utilisent-ils pas ce que le législateur présente comme une opportunité pour le patient actuel ou potentiel que nous sommes ?
Bien sûr, le déni de cette période redoutée peut être évoqué. La complexité des situations potentielles ne sera pas oubliée ainsi que leur caractère évolutif et souvent imprévisible. Le défaut d’information et d’accompagnement du public ou le manque de temps des médecins seront justement rappelés ainsi que l’insuffisante formation psychologique de ces derniers. La crainte de troubler -ou d’être troublé par- des personnes bien portantes ou malades ne sera pas ignorée. La confiance dans le système de santé joue aussi son rôle.
L’essentiel me semble résider ailleurs. Le législateur a voulu réaffirmer l’autonomie individuelle sur toute sa vie, probablement car il est un homme de pouvoir et de maitrise, peut-être parce qu’il vit ou observe la fragilisation de l’organisation familiale.
Pourtant, notre culture est profondément marquée par le rôle de notre famille, y compris si nous ne sommes plus en mesure de nous exprimer. Le citoyen « normal » fait encore majoritairement confiance à son entourage pour transmettre, sans formalisme, ses désirs ou son silence sur la fin de sa vie.