Communiquer un pronostic reste un exercice périlleux

Publié le par Louis Lacaze

Il arrive trop souvent qu’un médecin reporte le plus tard possible la discussion avec un malade à qui la médecine ne peut plus rien apporter. Retarder cette conversation ne va pas atténuer le choc qui va inévitablement se manifester. Lorsque le décès sera proche, le patient n’aura plus l’énergie de prendre les décisions importantes à ses yeux et regrettera de ne pas avoir pu réaliser ses derniers désirs.

Quelles sont les attentes du patient en fin de vie ? Il exige une franchise totale. Ne lui dites pas que vous ne pouvez pas deviner comment son cas va évoluer. Il ne va pas exiger une réponse définitive et catégorique mais il veut savoir quelles sont les probabilités de l’évolution de son état de santé en se basant sur les statistiques. Le patient veut se préparer à  envisager une issue positive ou négative. Il veut éviter les faux espoirs et les traitements inutiles.

L’information doit venir du médecin traitant, non d’un météore de passage qui ne sera pas écouté si le pronostic est pessimiste. Les mots doivent être choisis avec soin. Une information brutale ne peut plus être atténuée. Dire à un malade qu’on arrête la chimiothérapie, qu’il n’y a plus rien à faire, sortir de la chambre en le laissant en larmes manque pour le moins de subtilité. Une approche différente est suggérée : « la chimiothérapie n’est pas aussi efficace que nous l’espérions, elle est très pénible à supporter, nous allons arrêter le traitement pendant huit jours et nous ferons le point à ce moment-là ». Ce délai permettra au patient d’absorber le choc, de comprendre qu’il risque de perdre la bataille et de voir la réalité en face.

Un dernier point reste à souligner. Le patient a besoin de vous. Il sait que vous n’êtes pas la seule personne dont il doit s’occuper mais il doit être rassuré sur l’existence d’une totale collaboration entre les différentes personnes du service. Il ne doit  pas avoir la hantise de voir débarquer un inconnu qui ne l’a pas suivi et qui risque de ne pas suivre vos prescriptions.

Commentaires de Bernard Pradines : je partage les opinions exprimées dans la deuxième partie de ce texte. Je suis davantage réservé sur la première qui trace une voie trop univoque et pas assez personnalisée. Elle nous montre un chemin désirable mais loin d'être toujours réalisable.

Source : Linda Haller

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R
Tous les patients ne me semblent pas prêts à entendre un pronostic défavorable. La plupart posent des questions et il peut être important de leur répondre franchement. Quant aux autres, l'on peut en effet adopter la tactique du "délai" tel que présenté dans cet article, qui laisse du temps de part et d'autre.<br /> Les familles ont besoin d'être renseignées avec le plus de franchise. Car toute information manquante ou déformée prendra l'allure d'un mensonge, qui se transformera en colère et en dramatique perte de confiance.<br /> <br /> La loyauté me semble une règle absolue ! Le plus insupportable est de rester sans réponses. Toute information peut être entendue, puis digérée, y compris dire que l'on ne sait pas (si tel est le cas réellement). Ne pas savoir est mieux toléré qu'un silence, toujours perçu comme une volonté de ne pas informer.
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R
Je ne suis pas sûr que des modalités de communication puissent être transposée rapidement d’une culture et d’un espace à d’autres .
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Je tiens à rappeler que les articles décrivant des situations à l'étranger ne visent qu'à décrire ce qu'on peut voir au delà de nos frontières. Ils ne portent pas de jugement, ne suggèrent pas une imitation servile d'usages parfois peu transposables qui ne pourrait conduire qu'à un échec. Nous avons tous vu des patients totalement effondrés après avoir appris que leur cas était désespéré, des familles révoltées par la brutalité de certaines annonces. Ne nous voilons pas la face, le problème existe bien chez nous et justifie notre réflexion.