Innocent ou coupable ?
Une infirmière, Karen Roush, expose dans un blog ses frustrations après le décès d’une malade qui pendant des années de soins a refusé de suivre les conseils hygiène de vie qui lui étaient donnés.
"Voir un malade qui refuse de tenir compte de nos recommandations provoque frustration, colère et tristesse. On ne peut pas obliger quelqu’un à perdre du poids, lui interdire l’alcool ou le tabac. Nous devons nous efforcer de comprendre les raisons de cette attitude et trouver les outils qui permettront au malade d’adopter un comportement différent. Alors que les gens en bonne santé choisissent de vivre sainement, certains malades adoptent un comportement inverse. C’est peut-être ce que les infirmières ont le plus de mal à accepter."
Ce thème a été l’objet de vives discussions en 2013 aux Etats-Unis à la suite du classement de l’obésité comme maladie, donc échappant en principe au contrôle de la personne affectée.
Le Dr Doug Olsen, professeur du Michigan State University College of Nursing et rédacteur du journal américain du personnel infirmier (AJN) souligne un certain nombre de points.
"Les médecins doivent respecter l’autonomie et les décisions que les patients peuvent prendre. Ceux-ci sont donc responsables de leurs actes, quelles que soient les conséquences. La relation soignant-patient sera perturbée. Certains soignants auront tendance à moins s’intéresser à un malade qui ne fait pas tout son possible pour améliorer son état : le malade se sentira marginalisé et critiqué. D’autres vont au contraire compenser le manque d’adhésion du malade en lui accordant un maximum d’attention : le malade ne sera pas tenté de modifier son comportement. Idéalement le comportement du personnel ne doit pas être influencé par l’attitude du malade, ce qui est rarement spontané et exige un certain entrainement.
Il n’est plus possible de diviser les malades en deux catégories, ceux qui sont d’innocentes victimes et ceux qui récoltent ce qu’ils ont semé. Des comportements aberrants peuvent se rencontrer majoritairement dans certains milieux, certaines régions. De toute évidence, de nombreux facteurs sont à prendre en compte, remettant en cause la notion de responsabilité.
L’attitude à adopter devra être nuancée, sans rigidité. Au lieu de se demander si le malade est responsable de sa souffrance ou s’il est une victime innocente, il est préférable de se demander : « que puis-je faire pour améliorer sa santé et apporter quelque chose de positif à la société dans son ensemble ? »
Sources :
http://ajnoffthecharts.com/2013/07/15/when-loved-ones-and-patients-dont-choose-life/
Lecture suggérée :
http://well.blogs.nytimes.com/2013/07/12/blaming-the-patient-then-asking-forgiveness (Acte de contrition public d’un médecin qui regrette d’avoir critiqué le comportement d’un malade, suivi de nombreux commentaires).