Proscrire le mot « démédicalisation » pour les EHPAD
Ici ou là, hier ou demain, vous entendrez encore prôner la démédicalisation des EHPAD [1],[2],[3],[4] .
En 2018 déjà, j’attirais l’attention de mes lecteurs d’AgeVillagePro sur les risques de cette idéologie[5].
Depuis lors, la situation sanitaire de notre pays a évolué et laisse apercevoir une perspective encore plus préoccupante.
Le terme négatif de « démédicalisation » est d’autant plus surprenant que la situation sanitaire dans nos établissements médico-sociaux est inquiétante, en grande partie par manque de médecins coordonnateurs et même de médecins traitants. Tel directeur d’EHPAD se démène vainement pour recruter un médecin coordonnateur, tel autre s’émeut de résidents sans médecin. Dans une ville encore classée à moindre risque dans le zonage médical, il ne fait pas bon être un nouvel arrivant, quel que soit votre âge. Avec un peu de chance, vous serez recommandé ou même parrainé pour accéder au précieux praticien. Si vous l’obtenez, encore faudra-t-il que les délais des consultations soient raisonnables sans parler du temps passé en salle d’attente. La durée de la consultation elle-même sera souvent en principe limitée à quinze minutes et à une seule plainte. Dorénavant, on s’interroge sur la possibilité des pharmaciens de renouveler par dérogation des ordonnances de personnes âgées. La permanence des soins, joli nom donné à l’éventualité de visite urgente d’un médecin auprès des personnes âgées vulnérables, est souvent un lointain souvenir, surtout la nuit et le week-end. L’absence d’infirmière sur place pendant la nuit ou même en astreinte téléphonique n’a pas été corrigée de manière significative depuis qu’elle était évaluée à trois EHPAD sur quatre. Les services d’urgence, dont le fameux « 15 » sont sollicités en lieu et place des médecins généralistes. Des mesures substitutives, alternatives, adaptées à des situations précises, sont en voie de généralisation, telles que la télémédecine avec des cabines qui posent des questions déontologiques au vu des commentaires récents de la Commission Européenne et du conseil national de l’ordre des médecins.
L’avenir n’est pas davantage réjouissant : l’analyse de la pyramide des âges, plus particulièrement celle des médecins généralistes, montre que la situation actuelle ne peut que s’aggraver dans les cinq prochaines années.
Il est temps que les citoyens s’emparent de leur politique de santé et ne la laissent plus exclusivement à la représentation élue et à l’exécutif. Par exemple, la salarisation des médecins coordonnateurs et leur possibilité de prescrire, des centres de santé incluant un gériatre sont à promouvoir en urgence.