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André

Publié le par Bernard Pradines

Montaliès (Est-Aveyron). Fontaine sur le Causse de Séverac avec lavoir et abreuvoir

Montaliès (Est-Aveyron). Fontaine sur le Causse de Séverac avec lavoir et abreuvoir

André est né en 1929. Il est une de mes rencontres lors de mes courtes randonnées pédestres. Je l’ai connu assis devant sa vieille maison de pierre, là-haut dans un hameau aveyronnais qui jouxte le département de la Lozère.

Il est une mémoire de ce temps qui disparait peu à peu. Celui d’un monde différent, marqué par un conflit que l’on ne parviendra pas à oublier. Il est le témoin de son temps, de celles et de ceux qui le vivaient.

Il  est entré en EHPAD en décembre dernier, il y a sept mois. Pour ma part, je garde de mon expérience professionnelle la priorité des visites dans les désirs et attentes des résidents*. André ne sait pas que je vais lui rendre visite. Cette fois, il est assis dans le hall vitré d’entrée de l’établissement, mais reste toujours tourné vers l’extérieur. Je salue les blouses blanches sans que mon bonjour ne reçoive d’écho. Il n’a pas voulu assister à l‘animation dont il pense qu’elle ne le concerne pas.  Pénétrant dans l’édifice, je l’aperçois sans le reconnaitre avant de m’être adressé à lui en citant son nom. Arrivant masqué et de manière inattendue,  je suis aussi un étranger pour lui. Puis je me présente à lui. La surprise est considérable. Ses yeux deviennent humides. Nous échangeons pendant une demi-heure, surtout autour de ce temps que je n’ai pas connu. Je repars en promettant de revenir sans préciser de date.

Une bonne action, direz-vous, que votre serviteur prend plaisir à raconter. Il y a toutefois un aspect moins satisfaisant. Non, on ne me rejeta pas, on ne me reprocha pas d’être là. Mais on ne comprit pas que je pouvais souffrir de lombalgies en position debout statique prolongée. Surtout, on n’imagina pas que je dusse me placer à hauteur convenable de mon interlocuteur pour entretenir un dialogue d’égal à égal avec lui. Tout au long de ma visite, personne ne me salua, ne me proposa un siège.

Personnels d’EHPAD, je vous entends murmurer : nous sommes peu nombreux, nous n’avons pas le temps. Euh, en l’occurrence, je ne pense pas que ceci soit la vraie raison. L’habitude des situations professionnelles difficiles est probablement trop grande chez moi. Non, je vous renvoie à mon court « plaidoyer pour une chaise » rédigé en 2013.

 

*https://www.geriatrie-albi.com/desirsPA0904.htm

 

 

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A propos d’une réflexion sur notre système de santé

Publié le par Bernard Poch

Source : https://www.sudouest.fr/landes/labrit/ethique-et-gerontologie-au-programme-4813770.php

Source : https://www.sudouest.fr/landes/labrit/ethique-et-gerontologie-au-programme-4813770.php

L'auteur de ce texte, Bernard Poch, est psychogériatre retraité

La réflexion éditoriale de notre confrère Nadir Kadri (à paraitre dans NPG*) mérite un échange sur un sujet d’actualité aussi préoccupant.

Notre hôpital public se retrouve en effet dans un contexte catastrophique et le titre de l’auteur sur notre système de santé « comme le Phoenix, peut-il encore renaître de ses cendres ? » n’a rien de provocateur. Il traduit clairement la gravité de la situation hospitalière. Depuis trop longtemps, la politique sanitaire a régulièrement sapé le bon fonctionnement de l’hôpital avec l’installation progressive d’une perte de sens pour les soignants qui devient insupportable. Les modifications de gouvernance n’ont rien eu de favorable. On est passé d’une organisation fondée logiquement sur les besoins sanitaires à satisfaire sur le territoire de l’hôpital à une organisation sur le mode d’entreprises où l’équilibre budgétaire est devenu l’élément largement prioritaire avec objectif de productivité et de rentabilité. Avec la pénurie de personnel le concept de procédure dégradée finit par s’installer comme s’il était naturel. La notion de perte de chance pour le patient devient présente.

Quant à l’augmentation des personnels administratifs, c’est en particulier l’introduction des directions « qualité » qui interroge avec la multiplication des procédures diverses qui paradoxalement éloignent les soignants du malade du fait du temps nécessaire pour « tracer ». 

Quant à la tarification à l’activité les premières années d’application montraient déjà que ce n’était pas la bonne solution et on a laissé s’installer tous ses effets pervers.

Nous avons assisté à une réduction d’abord insidieuse puis régulière du nombre de lits avec contraction des effectifs, comme si les progrès en médecine et en chirurgie permettaient une rotation beaucoup plus rapide des patients.

Quant au vieillissement de la population repérable et analysé depuis longtemps, il a obligé à reconnaître la gériatrie du bout des lèvres. Des textes précis sont sortis pour l’organisation hospitalière de soins gériatriques : circulaire DHOS du 18/03/2002, complétée avec la circulaire DHOS du 28/03/2007. Mais de trop nombreux hôpitaux n’ont toujours pas de filière gériatrique complète, avec des conséquences malheureuses pour les patients les plus âgés. De plus on reste dans un flou entretenu qui mêle EHPAD médico-social et Unité de soins de longue durée hospitalière. C’est ainsi que des personnes âgées avec polypathologie régulièrement instable sont de plus en plus nombreuses en EHPAD.

Notre population continue de vieillir avec des besoins hospitaliers spécifiques évidents, mais on ne voit pas la généralisation d’une vraie organisation gériatrique. Il a été décidé de développer largement l’ambulatoire qui a des indications précises, mais bien peu fréquentes pour les malades les plus âgés.

De même la télémédecine est un progrès dans des disciplines et situations particulières, mais on voit bien que son développement compense surtout la pénurie médicale au risque de pervertir la qualité du lien médecin-malade.

La gériatrie reste à défendre et à promouvoir. Elle est loin d’être réellement présente de la même façon sur l’ensemble du territoire.

Pour en revenir plus directement au propos de mon confrère : « les professionnels demandent qu’il soit pris soin des acteurs présents sur le terrain ». En effet les personnels hospitaliers ont été trop longtemps abusés dans leur conscience professionnelle. Il va être difficile et long, après tant d’indifférence à leur égard, de récupérer une attractivité pour l’hôpital. « Les candidatures tardent car l’attractivité est balayée par la perte de confiance ».

Sur les vingt dernières années le poids administratif dans la gouvernance s’est amplifié sans bénéfice évident pour la qualité du soin. Le retour à un meilleur équilibre décisionnel avec les médecins, avec la notion de service ne serait pas inutile.

« Pour renaître de ses cendres » l’hôpital aura besoin de restaurer ses valeurs humanistes et de sortir de ce délétère schéma entreprise. 

 

*A paraitre. Le système de santé français vu par l’œil d’un gériatre : comme le Phœnix, peut-il encore renaître de ses cendres ? Revue NPG.

N. Kadri, Service de médecine gériatrique, hôpital Saint-Julien, CHU de Rouen, 76031 Rouen, France.

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