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La pâtée aux cochons

Publié le par Pasquale

La pâtée aux cochons

Pasquale était infirmière et surveillante (cadre de santé)

Entendu en présence des résidents que l’on aide à prendre leur repas :

« - Tu en mangerais, toi, de ça ?

- Tu veux rire, c'est de la pâtée aux cochons »

J’ai entendu aussi cette réflexion et bien pire.

Quand je suis arrivée dans la maison de retraite, les petits déjeuners et les repas étaient effectivement dignes de cochons. Ma grand-mère qui soignait ses bêtes avec amour leur faisait un “rata” ressemblant à celui fabriqué par les aides-soignants et infirmiers. Le matin, un joyeux mélange de beurre, confiture, café, pain ou biscottes écrasées agrémenté de “LANSOYL (1)” ou autre, les médicaments écrasés décoraient le bol. Le tout était, pour certains résidents, installé sur une table roulante face à la chaise percée sur laquelle ils étaient assis. Le midi, rebelote en sucré salé. Franchement je n’ai jamais goûté, ma réaction première étant davantage à vomir.

Au risque de passer pour une enquiquineuse, j’ai tout bonnement interdit ces pratiques. Pour les personnes nécessitant un repas mixé, le mélange était celui du menu. Viande et légumes, poisson et légumes avec selon le plat, parfois une crème de gruyère pour agrémenter. Le dessert était servi en fin de repas.

Alors, j’ai goûté, j’ai tout goûté.

J’ai demandé aux infirmiers d’abord de m’accompagner puis au reste du personnel. Certains ont rechigné et ne se sont exécutés que lorsque je leur ai demandé comment ils préparaient le repas de leurs petits enfants : de la même manière donc ! Enfin tous les stagiaires devaient, comme exercice, donner leur avis sur le goût et la texture de ce que nous offrions comme repas.

Les réactions premières étaient souvent une marche arrière angoissée mais il n’y eut jamais un refus ferme.

Dommage que ce sujet ne soit pas au programme des études soignantes. Lorsque je faisais des formations, je l’abordais toujours. Au cours des discussions, les stagiaires infirmiers ou aides-soignants révisaient souvent leurs a priori.

(1) LANSOYL : gel oral dont la substance active est de la paraffine liquide. Il s’agit d’un médicament utilisé dans la prévention de la constipation. Son utilisation est actuellement fortement contestée du fait de certains effets secondaires graves.

Publié dans repas, résidents, respect

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Les torchons et les serviettes

Publié le par Pasquale

Les torchons et les serviettes

L'auteur de ces lignes, Pasquale, était infirmière et surveillante (cadre de santé).

Le non-mélange des couverts et des WC et douche n’est pas nouveau dans les établissements. Tout au long de ma carrière, ce sujet a été une réalité à quelques exceptions près.

En pédopsychiatrie par exemple. Là nous mangions avec les enfants, qui ne se gênaient pas pour mettre leurs mains parfois souillées dans nos assiettes. Nous nous servions des mêmes douches et des mêmes toilettes. Ce n’était pas le cas dans d’autres services de pédopsychiatrie. La différence entre cet hôpital et d’autres tenait à ce que le patron de l’époque (années 70) était un précurseur dans le soin aux enfants malades mentaux.

Alors qu’à l’hôpital psychiatrique, quelques infirmiers, par crainte de transmission de "on ne sait jamais,” faisaient couverts à part. Les mêmes avaient des attitudes à l’opposé lorsque nous partions plusieurs jours en gîte. Ces habitudes étaient quasi-inexistantes en secteur extra hospitalier (CATTP (1), dispensaire) : pas de couverts, ni de verres, ni de WC différents et pas de blouse non plus.

A la maison de retraite. Alors là quand je suis arrivée, c’était « les vieux, beurk ! Beurk ! Beurk ! ». Finalement, après plusieurs années, les comportements ont changé. En effet, j’avais organisé une restauration (volontaire) de tous les personnels à table avec les résidents. Là, pas question d’amener ses couverts. Au départ, il y a eu des réticences. Quand je suis partie, tous les personnels (IDE, AS et ASH) prenaient leurs repas avec nos anciens. Ceci ne faisait pas l’affaire de la direction et de mes collègues cadres de l’hôpital mais je m’en fichais royalement ! En ce qui concerne les WC, les réticences venaient du fait que nos vieux messieurs faisaient pipi sur la cuvette. Un fait ! Après discussion et renforcement du nettoyage de ces lieux, la course aux clefs du WC du personnel avait bien diminué.

Au fil du temps, j’ai pu remarquer que les rapports avec les malades ou résidents avec les personnels qui ne partageaient pas les couverts et les autres étaient différents. Ceux qui partageaient étaient beaucoup plus empathiques, plus proches, plus à l’écoute que les autres (du médecin à l’ASH). Les autres n’étaient pas pour autant de mauvais soignants mais la distance qu’ils mettaient entre eux et les malades en faisait des soignants plus “techniciens”. Les premiers n’hésitaient pas à mettre la “blouse ou la tenue “ de côté alors que les seconds n’envisageaient même pas de sortir en ville sans.

On ne mélange pas les torchons avec les serviettes est l’expression qui me vient immédiatement.

(1) CATTP : (Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel)

Publié dans respect, résidents

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