Faut-il leur foutre la paix ?
L’expression n’est pas élégante. Elle est pourtant souvent employée à propos des pathologies et surtout des traitements des personnes âgées.
Leur foutre la paix, c’est, dit plus poliment, ne pas entreprendre des traitements que l’on aurait prescrit si le patient avait été plus jeune ou en meilleure santé. On croit ainsi avoir tout dit.
Or, s’abstenir est une décision qui est éventuellement évidente et bénéfique, parfois non. Au début de ma carrière, peu de médecins s’aventuraient à opérer une personne âgée de plus de 90 ans. Qu’en est-il à présent ? Des situations qui étaient alors considérées comme relevant d’une abstention raisonnable, où l’on « fichait la paix » au malade, sont désormais regardées comme une perte de chance, un abandon thérapeutique. A l’inverse, des traitements ont été délaissés car trop agressifs.
Les soins bénéfiques ne peuvent pas se résumer à une formule à l’emporte-pièce qui donne bonne conscience mais occasionne encore des retards préjudiciables de diagnostic et de traitement. On « foutra la paix » sur des arguments solides, au cas par cas. Pas au pifomètre pour se rassurer ou se faire plaisir.