PARO : pragmatisme ou réticences philosophiques et éthiques ?
Image issue du site : http://www.linternaute.com/nature-animaux/bebes-phoques-l-arctique-tendrement/sauvons-les-bebes-phoques.shtml
Louis Lacaze (dit Papi) nous a instruits récemment de la robotique en gériatrie. Voir l’article sur ce thème. (http://free.geriatrics.overblog.com/2015/09/robotique-et-geriatrie-une-tendance-deshumanisante-pourtant-serieusement-envisagee.html)
Désormais, la robotique est censée imiter un animal. PARO, le robot-phoque initialement conçu au Japon, débarque en France. Vêtu d’une fourrure agréable à caresser, il est capable de se mouvoir et d’émettre des sons inspirés des vrais cris des bébés phoques. Vous savez, ceux pour qui nous éprouvons tant de compassion et de culpabilité lorsque nous voyons avec effroi le sort qui leur est réservé.
PARO ne souffre pas comme nombre de ses congénères vivants mais il n’éprouve pas de plaisir non plus. Il ne mange pas, ne boit pas, bref il ne possède aucune de nos fonctions physiologiques. Il n’éprouve pas de douleur. Il ne meurt pas comme un être vivant car il est un objet qui sera jeté après usage. Il est le produit d’avancées considérables de la science dont on ne sait pas ici s’il faut les qualifier de progrès. Il est le révélateur de capacités de projection de nos sens et surtout de nos sentiments sur un objet animé par des microprocesseurs et bourré de capteurs sensibles à des forces physiques et à des sons. Un objet et non un animal, ce qui peut être de prime abord considéré comme une tromperie du fait de son apparence; il est fort à parier que les réticences les plus grandes viendront de l’entourage des patients ainsi abusés avant d‘être celles de ceux-ci. Un poupon ou une peluche animée, est-ce acceptable ?
Au moins si l’objet est présenté en tant que tel aux patients dans la mesure où les troubles cognitifs ne sont pas trop importants, ils sauront à quoi s’en tenir. Mais s’ils considèrent cet objet comme un animal lorsque leurs capacités de jugement sont perturbées, devons-nous nous en réjouir avec eux ? Admettre qu’un animal réel pourrait souffrir auprès de nos anciens ?
En tous cas, un des mérites de PARO, surtout en cas de réussite individuelle, est bien de souligner le défaut de présence réelle, humaine ou animale, auprès de la personne âgée. Une délégation technique en quelque sorte, masquant l’indigence d’un réconfort humain.
Les habituelles questions posées par toute nouveauté ne seront pas absentes : la gestion d’un tel dispositif ne viendra-t-elle pas accroitre la charge de travail ? Son prix d’achat et d’entretien n’est-il pas disproportionné aux bénéfices attendus ?
Mais ici, les questions vont bien au-delà. Catastrophe humanitaire et dépersonnalisation diront les uns. Victoire de la technologie diront les autres. Ne méprisons pas davantage nos résidents en les infantilisant encore davantage, diront les uns. Soyons pragmatiques et utilisons tout ce qui peut apaiser nos patients anxieux ou agités et « opposants » diront les autres.
Le débat est ouvert. Et vous, qu’en pensez-vous ?
Sources :