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387 résultats pour “patient idéal

PARO : pragmatisme ou réticences philosophiques et éthiques ?

Publié le par Bernard Pradines

Image issue du site : http://www.linternaute.com/nature-animaux/bebes-phoques-l-arctique-tendrement/sauvons-les-bebes-phoques.shtml

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Louis Lacaze (dit Papi) nous a instruits récemment de la robotique en gériatrie. Voir l’article sur ce thème.  (http://free.geriatrics.overblog.com/2015/09/robotique-et-geriatrie-une-tendance-deshumanisante-pourtant-serieusement-envisagee.html)

Désormais, la robotique est censée imiter un animal. PARO, le robot-phoque initialement conçu au Japon, débarque en France.  Vêtu d’une fourrure agréable à caresser, il est capable de se mouvoir et d’émettre des sons inspirés des vrais cris des bébés phoques. Vous savez, ceux pour qui nous éprouvons tant de compassion et de culpabilité lorsque nous voyons avec effroi le sort qui leur est réservé.

PARO  ne souffre pas comme nombre de ses congénères vivants mais il n’éprouve pas de plaisir non plus. Il ne mange pas, ne boit pas, bref il ne possède aucune de nos fonctions physiologiques. Il n’éprouve pas de douleur. Il ne meurt pas comme un être vivant car il est un objet qui sera jeté après usage. Il est le produit d’avancées considérables de la science dont on ne sait pas ici s’il faut les qualifier de progrès. Il est le révélateur de capacités de projection de nos sens et surtout de nos sentiments sur un objet animé par des microprocesseurs et bourré de capteurs sensibles à des forces physiques et à des sons. Un objet et non un animal, ce qui peut être de prime abord considéré comme une tromperie du fait de son apparence; il est fort à parier que les réticences les plus grandes viendront de l’entourage des patients ainsi abusés avant  d‘être celles de ceux-ci.  Un poupon ou une peluche animée, est-ce acceptable ?

Au moins si l’objet est présenté en tant que tel aux patients dans la mesure où les troubles cognitifs ne sont pas trop importants, ils sauront à quoi s’en tenir. Mais s’ils considèrent cet objet comme un animal lorsque leurs capacités de jugement sont perturbées, devons-nous nous en réjouir avec eux ? Admettre qu’un animal réel pourrait souffrir auprès de nos anciens ?

 En tous cas, un des mérites de PARO, surtout en cas de réussite individuelle, est bien de souligner le défaut de présence réelle, humaine ou animale, auprès de la personne âgée. Une délégation technique en quelque sorte, masquant l’indigence d’un réconfort humain.

Les habituelles questions posées par toute nouveauté ne seront pas absentes : la gestion d’un tel dispositif ne viendra-t-elle pas accroitre la charge de travail ? Son prix d’achat et d’entretien n’est-il pas disproportionné aux bénéfices attendus ?

Mais ici, les questions vont bien au-delà. Catastrophe humanitaire et dépersonnalisation diront les uns. Victoire de la technologie diront les autres. Ne méprisons pas davantage nos résidents en les infantilisant encore davantage, diront les uns. Soyons pragmatiques et utilisons tout ce qui peut apaiser nos patients anxieux ou agités et « opposants » diront les autres.

Le débat est ouvert. Et vous, qu’en pensez-vous ?

Sources :

http://www.phoque-paro.fr/

http://www.agevillage.com/actualite-11619-1-paro-la-peluche-experimentee-en-maison-de-retraite-pour-les-malades-d-alzheimer.html

Publié dans éthique

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Droits des patients, droits des soignants

Publié le par Bernard Pradines

Image issue de l'adresse : https://www.youtube.com/watch?v=Ti8uSsXko18

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Selon la DREES en 2015, un quart des français meurent en EHPAD, tous âges confondus.

L’article 2 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 dit les droits « inaliénables et sacrés ». Quand la « liberté d’aller et de venir » et le « comme chez soi » trouvent un démenti cinglant, voici revenu l’éternel dilemme entre liberté et sécurité. C’est la rencontre historique entre une manière inédite de vivre le grand âge, plus souvent institutionnelle et collective d’une part, et une pandémie mémorable d’autre part. Le 13 mars 2021, Michèle Delaunay tweete à propos des établissements : « Aurait-on pu imaginer des prisons pour les grands-âgés ? ». Contemporaine, une pétition affirme que ces « lieux avec les restrictions actuelles au niveau des visites se sont transformés en véritables prisons » ; elle recueille 16 696 signatures après quatre jours de publication. Certes, la vie quotidienne des âgées à domicile est majoritaire, mais elle est aussi solitaire. En 2017, selon l’INSEE, 61,6 % des femmes françaises de 80 ans ou plus vivent seules. Le confinement y est délétère, là aussi.

Mis côte à côte, les droits des patients peuvent apparaître comme limités par ceux des soignants. Sujet immense, prenons cinq exemples de rencontre des droits des uns et des autres : les directives anticipées, la personne de confiance, le consentement aux soins, la personne qualifiée et la proposition de loi sur l’aide active à mourir. Cinq configurations où la détermination des uns peut questionner les décisions des autres.

Les directives anticipées, inaugurées par la loi de 2005 sont un écrit dont les modalités sont précisées dans la loi de 2016. Elles sont conçues pour un refus du patient d’une prolongation de sa vie par « obstination déraisonnable ». Elles sont très peu utilisées malgré de fortes incantations pour en promouvoir la rédaction. Un flop ! Leur prévalence connue est de quelques pourcents bien qu’elles puissent être présentées, abusivement, comme un devoir et non un droit à l’entrée dans un établissement de soins ou médico-social.

La personne de confiance, instituée par la loi de 2002 , est censée rendre compte de la volonté de la personne soignée incapable de s’exprimer. « Son témoignage prévaut sur tout autre témoignage ». Bien que moins boudée que les directives anticipées, cette disposition est rarement utilisée spontanément. Ici aussi, sa désignation peut sembler aller de soi malgré son caractère facultatif. Attention : il n’est jamais écrit que cette personne est la seule interlocutrice des soignants.

Le consentement libre et éclairé est un socle légal rassurant ; que nenni, les « maladies d’Alzheimer et apparentées » aux stades sévères posent un problème quantitativement inédit d’impossibilité de consentir. L’assentiment, terme peu apprécié des législateurs, est une notion naissante qui reste à préciser.

De nouveaux droits sont pratiquement inconnus tels que le recours possible à une « personne qualifiée » pour « faire valoir ses droits » en établissement.

Enfin, une réalité dérange : celle de ne pas maîtriser la fin de notre vie. D’où la pression pour « une aide active à mourir », ce qui indiquerait un progrès urgent : le développement des soins palliatifs et non des solutions expéditives inscrites dans le marbre de la loi.

Encore des efforts ? Oui, je le crains.

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